Pierre Garnier, secretaire a la grecque en acajou massif
Paris vers 1765-1775

Pierre Garnier (1726-1806)
Secrétaire à la grecque en acajou massif
Acajou massif, bâti en chêne, bronze doré, marbre bleu turquin
Estampillé trois fois P.GARNIER
Pierre Garnier reçu maitre en 1742
Paris vers 1765-1775
Hauteur : 141,5 cm / Largeur : 126,5 cm / Profondeur : 47,5 cm
Large secrétaire en armoire en acajou massif, décoré de panneaux dans des encadrements, ouvrant par un abattant et deux vantaux en partie basse. L’abattant découvre une série de huit tiroirs, en deux registres, encadrant deux niches et surmonté d’une tablette.
Ce secrétaire à pans coupés, aux lignes solides et architecturées, est une parfaite illustration du « goût grec », l’un des courants stylistiques les plus novateur du XVIIIe siècle, en ce qu’il amorça un véritable renouvellement des formes, dans les arts décoratifs, pendant les dernières années du règne de Louis XV. Héritier d’un mouvement qui se manifeste dans l’architecture française dès les années 1740, et qui coïncide avec la redécouverte des sites d’Herculanum (1738) et de Pompéï (1748), le goût grec est décliné à partir des années 1760 dans l’ébénisterie parisienne, en réaction contre le gout rocaille, que la nouvelle génération juge corrompu. Il se traduit par l’emploi des lignes rectilignes de l’architecture classique, empruntées à l’ornementation et au vocabulaire gréco-romain. L’un des précurseurs de ce goût grec fut l’architecte et décorateur Louis Joseph Le Lorrain (1715-1759). Cette mode nouvelle, qui nait donc à la fin du règne de Louis XV et qui préfigure le néoclassicisme tel qu’il s’épanouira sous le règne de Louis XVI, séduit à l’époque une clientèle de financiers et de collectionneurs issus de la haute bourgeoisie parisienne, tel Ange Lalive de Jully et le marquis de Marigny, frère de Madame de Pompadour, pétris de culture antique, avides de nouveauté et soucieux de rompre avec l’ornementation parfois excessive du style rocaille.
Pierre Garnier fut l’un des promoteurs de ce goût grec. Né vers 1726 à Paris, il était le fils d’un ébéniste, François Garnier (†1760), actif dans la première moitié du XVIIIe siècle, qui était établit au faubourg Saint-Antoine et qui signait de ses initiales F.G. Pierre Garnier fut reçu maître en 1742, alors qu’il n’avait pas vingt ans, et fit une carrière brillante. Sa première décision fut de quitter le faubourg Saint Antoine pour s’installer rue Neuve des Petits Champs, dans le quartier ou résidait la finance parisienne. Il fut proche de son confrère Etienne Levasseur dont il fut l’un des témoins de mariage en 1748, et a son propre mariage en 1754, la présence de témoins aussi prestigieux que les deux frères Richard, l’abbé de Saint Non et Louis Richard de La Bretèche, témoigne de liens d’affaires et d’amitié avec cette élite parisienne.
Garnier fut avec les ébénistes Jean-François Oeben Jean-François Leleu et Joseph Baumhauer l’un des pionniers du style néoclassique, et ses créations des années 1760-1770 accompagnèrent l’émergence du style « à la grecque », dont les premières manifestations se traduisirent par la création de mobilier dans le goût de Boulle, en ébène décoré de bronzes dorés. En 1761 Garnier réalise des meubles à la grecque sur des dessin de Charles de Wailly (1730-1798), qui furent exposés au Salon la même année, dont un secrétaire « traité dans le meilleur gout de Boulle ». Par la suite les principaux clients de Pierre Garnier furent la famille d’Orléans, la duchesse de Mazarin, le marquis de Marigny, qui en tant que directeur des bâtiments du roi exerçait une sorte de ministère des Arts, et à qui il livra pour son hôtel de la place des Victoires, tous un ensemble de meubles en acajou ou en ébène, y compris en 1778 tout un ensemble de trente-six fauteuils cannés en acajou, le roi Gustave III de Suède qui fit l’acquisition à Paris en 1770 d’une paire de commodes, le maréchal de Contades pour lequel il livra en 1775 la majeure partie du mobilier du château de Montgeoffroy, la marquise de Brunois, le marquis de La Vaupalière, auquel il livra un secrétaire en laque du Japon, aujourd’hui conservé au Louvre, qui présente des entrées de serrures identiques à celles de notre secrétaire.
Pierre Garnier (1726-1806)
A solid mahogany Greek-style secrétaire a abattant
Solid mahogany, oak, gilt bronze, steel, bleu turquin marble top
Stamped three times P.GARNIER
Pierre Garnier received master in 1742
Paris circa 1765-1775
57,28 in. (141,5 cm) high, 49,80 in. (126,5 cm) wide, 18,70 in. (47,5 cm) deep
A large solid mahogany secrétaire à abattant, decorated with panels in gilded frames, the fall-front enclosing a green gilt-tooled leather-lined writing surface and a fitted interior with eight drawers framing two niches and topped by a shelf, the lower section with two doors opening to reveal a shelf.
With its solid, architectural lines, this desk is a perfect illustration of the ‘Gout Grec’ (Greek taste), one of the most innovative stylistic trends of the 18th century, that has initiated a veritable renewal of forms in the decorative arts during the last years of the reign of Louis XV. Heir to a movement in French architecture that began in the 1740s and coincided with the rediscovery of the sites of Herculaneum (1738) and Pompeii (1748), the Greek taste was introduced into Parisian cabinetmaking in the 1760s as a reaction against the rocaille taste, which the new generation considered corrupt. It was expressed through the use of the rectilinear lines of classical architecture, borrowed from Greco-Roman ornamentation and vocabulary.
One of the precursors of this Greek taste was the architect and decorator Louis Joseph Le Lorrain (1715-1759). This new fashion, which emerged at the end of the reign of Louis XV and foreshadowed the neoclassicism that would flourish under Louis XVI, attracted a clientele of financiers and collectors, such as Ange Lalive de Jully and the Marquis de Marigny, brother of Madame de Pompadour, who were steeped in ancient culture, eager for novelty and keen to break away from the sometimes excessive ornamentation of the Rococo style.
Pierre Garnier was one of the promoters of this Greek taste. Born around 1726 in Paris, he was the son of a cabinet-maker, François Garnier (†1760), who was active in the first half of the 18th century, established in the Faubourg Saint-Antoine and signed with his initials F.G. Pierre Garnier was awarded his master's degree in 1742, when he was not yet twenty, and had a brilliant career. His first decision was to leave the Faubourg Saint Antoine and move to rue Neuve des Petits Champs, in the district where Parisian finance was based. He was close to his colleague Etienne Levasseur, whose wedding he witnessed in 1748, and at his own wedding in 1754, the presence of such prestigious witnesses as the two Richard brothers, the Abbé de Saint Non and Louis Richard de La Bretèche, testifies to his business ties and friendship with this Parisian elite.
Alongside other cabinetmakers such as : Jean-François Oeben, Jean-François Leleu and Joseph Baumhauer, Garnier was one of the pioneers of the neoclassical style, and his designs from 1760-1770 accompanied the emergence of the ‘à la grecque’ style, the first manifestations of which were seen in the creation of furniture in the taste of Boulle, in ebony decorated with gilded bronzes. In 1761, Garnier produced Greek-style furniture based on designs by Charles de Wailly (1730-1798), which were exhibited at the Salon the same year, including a secretary ‘treated in the best Boulle taste’. Subsequently, Pierre Garnier's main clients were the Orléans family, the Duchess of Mazarin, and the Marquis de Marigny, who, as director of the king's buildings, exercised a sort of ministry of the arts, and to whom he supplied a whole range of mahogany and ebony furniture for his hotel on the Place des Victoires, including a whole set of thirty-six mahogany caned armchairs in 1778, King Gustav III of Sweden, who purchased a pair of commodes in Paris in 1770; the Maréchal de Contades, for whom he supplied most of the furniture for the Château de Montgeoffroy in 1775; the Marquise de Brunois; and the Marquis de La Vaupalière, to whom he supplied a Japanese lacquer secrétaire, now in the musée du Louvre, with lock escutcheons identical to those on our secrétaire